Poetica, des poèmes d’avenir, du présent, du passé...


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Sélection : poèmes à la une

Après-midi de printemps

Sybille Rembard
Anita Rée, Les arbres blancs, 1925
Anita Rée, Les arbres blancs, 1925

Cris d’enfants
transperçant le silence
des cerisiers en fleur
De loin une berceuse rythme chaque pas
Promenade solitaire au cœur de la cité
anesthésiée
Dans le labyrinthe du présent
malade
l’oxygène flotte entre les branches
parfumées de mort

Sybille Rembard, 2020

Sélection : poèmes à la une

La mer, toujours recommencée

Jean-Pierre Villebramar

« le vent se lève, il faut tenter de vivre… »
Paul Valéry

Je ne veux pas mourir,
mais revoir ce soleil
qui vous brûle le coeur

Je ne veux pas mourir,
mais vers la mer courir
et vers la mer aller

comme vers une mère
qui accueille l’enfant
et me sentant léger

nager ! Jusqu’à la barre
atteignant les hauts fonds
où grondent les brisants

Je ne veux pas mourir
encor donner la vie
et enfin m’en aller

apaisé !

Villebramar, 2025

Sélection : poèmes à la une

Vincent

Adrien Benistant

Je t’écris face au miroir
Mon frère
Où je vois mon reflet
Où je vois ton visage
Je porte dans mon cœur
Mon frère
De communes images
Nos destins ricochant
Sur nos vies, ces nuages
Je rends un hommage
Mon frère
A ces instants éternels
Où se fige l’amitié
Où se figent nos regards
Je vis dans l’espoir
Mon frère
De partager une rencontre
Des histoires sans mots
Des mots sans histoire

Adrien Benistant

Sélection : poèmes à la une

Envie

Murièle Camac

Il y a des jours où ça me prend
la poésie
l’envie d’écrire un poème
envie envie envie
je suis là
j’attends des mots un rythme
j’attends un signe du monde
monde indique-moi donc ça
je suis là je cherche
dedans dehors
où est le signe il doit bien y en avoir un
un son un souvenir de rêve un mouvement

j’attends dans le monde le signe
comme la sainte dans sa cellule
attend son ange
ou comme l’enfant sur son pot
attend que ça sorte
c’est sûr ce n’est pas la même chose
si ça vient de l’ange ou de l’intestin
extase ou déjection
m’en fous je veux juste un poème
que ça monte ou que ça descende

Murièle Camac, Regarder vivre, 2016

Sélection : poèmes à la une

Demain la paix

Jean-Marc Chanel

Combien de temps encor nous faut-il endurer
le froid, le noir, la soif, la faim, les destructions,
les blessés et les morts : la folie de la guerre
où les innocents paient pour les commanditaires.

Ayant dû quitter femme et puis prendre fusil,
je traîne une âme en peine au milieu des combats.
Comment me résoudre à tuer le moindre frère ?
Ne le dis à personne, oui ; moi je tire en l’air.

Un jour viendra, et il est proche, où se tairont
les voix des va-t-en-guerre avec tous leurs canons.
A nouveau la justice embrassera la paix.

Mains tendues par-dessus les barbelés de haine,
l’agresseur comprendra que l’agressé d’hier
ne fut jamais qu’un malheureux bouc-émissaire.

Jean-Marc Chanel

Sélection : poèmes à la une

Zêta

Kamal Zerdoumi

Cette lettre grecque
qui signifie « il est vivant »
Devise pour celles et ceux
qui résistent
au massacre
de Gaza à l’Ukraine
du sacre
de la barbarie
au paroxysme de la haine
Planète, que se passe-t-il à ta surface
inondée de sang versé
par des créatures
à l’âme de glace ?
Partout des vies sacrifiées
sur l’autel de l’Orgueil
Partout ta beauté scarifiée
par le scalpel des deuils !
Zêta, lettre jadis solaire
aujourd’hui veuve des peuples
alliance de désespoir
et de colère

Kamal Zerdoumi, 2025

Sélection : poèmes à la une

De là-bas

Grégory Rateau

J’ai appris de vos préaux, de la peinture écaillée, des fonds de couloir, des jupes trop longues.
J’ai appris à faire mentir la nuque, les rires parfois faisaient le détour.
J’ai appris à prendre l’horizon pour cible comptant simplement à rebours. Rivé aux sonneries du départ, les adultes n’y comprenaient goutte : ils notaient mes feuillets sans trop rien déchiffrer.
J’ai appris le sacrifice des heures où le soleil lui poursuivait sa route, pénard, loin de vos encriers.
Assis là en position d’attaque, j’apprends toujours…

Grégory Rateau, 2024