La chèvre

Sabine Sicaud

L’herbe est si fraîche, ce matin,
Que son velours tendre nous hante –
Son velours neuf qui sent la menthe,
Le jeune fenouil et le thym.

La vache s’étire, gourmande,
Vers le champ de trèfle voisin.
Tous les verts bordent le chemin
Du vert acide au vert amande.

Mais c’est un velours trop soigné
Qui s’aligne entre les clôtures…
Dans les ronces, à l’aventure,
La chèvre aime s’égratigner.

Elle aime le vert des broussailles
Où l’ombre devient fauve un peu,
Et ce vert d’arbres presque bleus
Que tous les vents d’orage assaillent.

C’est bien au-delà des sillons
Et des vergers gorgés de sèves,
Que les clochettes de son rêve
Éparpillent leurs carillons…

Parfois, un glas les accompagne…
Mais il fait beau, c’est le matin !
Chevrette de Monsieur Seguin
Ne regardez pas la montagne…

Sabine Sicaud, Poème d’enfant, 1926

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