Ballade du condamné

Michel Ménaché

à Patrice Lumumba
et Che Guevarra

Ils m’ont ouvert le ventre
en sont sortis des oiseaux
cent oiseaux multicolores
qui ont chanté l’amour de vivre

ils m’ont crevé les yeux
en ont jailli deux sources claires
deux sources fortes et vives
qui ont rafraîchi la terre lasse

ils m’ont arraché les ongles
et chaque fois une fleur s’ouvrait
pour qu’un papillon s’y posât
ou une abeille parfumée

alors ils m’ont coupé les bras
mes bras se sont dressés en terre
et ils ont vu deux cerisiers
les cerises rougissaient vite

ils ont aussi cherché mon cœur
l’ont piétiné l’ont saccagé
ils ont senti qu’ils s’enfonçaient
un lac naissait sous leurs pieds sales

ils sont partis fous de colère
terreur de me sentir partout si proche
et les oiseaux au-dessus d’eux
chantaient que je n’étais pas mort

Michel Ménaché
Pavés et Fenêtres, éd. Pierre-Jean Oswald 1971

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