Sentinelle

Didier Venturini

c’est bien sûr la nuit
quand tout est sombre
que le moindre bruit
vient faire peur à l’ombre

que même un fusil
tremble sous vos doigts
l’acier qui vous dit
tu n’es plus chez toi

Les heures qui vous creusent
indéfiniment
cette peur silencieuse
un isolement

bien sûr l’autre en face
celui que l’on craint
l’inquiétante menace
moiteur de vos mains

c’était de Port-Vendres
où d’un autre port
ce bateau pour prendre
un pied dans la mort

ces hommes que l’on tue
les autres qui tombent
tout ce sang perdu
rien qu’une hécatombe

retour au silence
malaise muet
un mur de souffrance
l’hôpital des plaies

Puis nous voilà vieux
sans avoir vécu
condamnant au feu
nos jeunesses perdues

c’est bien sur la nuit
quand tout est sombre
que remontent les cris
qui font peur à l’ombre

Didier Venturini, Memento mori, 2017

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