Le livre de mon coeur

Félix Arvers

La Porte-Saint-Martin va donner des Mystères
Où Paris tout entier se hâte d’accourir.
Tout manque, les balcons, les loges, les parterres ;
J’ai pourtant une place et je vais vous l’offrir.

Ce théâtre où jadis je vous ai rencontrée
Me rappelle un passé bien cruel et bien doux.
C’était un soir d’été, douce et chaude soirée ;
Je m’en souviens encor : vous en souvenez-vous ?

Que de choses depuis ! — La vie est ainsi faite.
Je voulais vous avoir, vous n’avez pas voulu
Et j’ouvris devant vous oublieuse et distraite
Le livre de mon cœur où vous n’avez rien lu.

Eh bien, il est au moins un bienfait que j’implore,
Triste et suprême appel que vous fera ma voix,
Qu’une dernière fois je vous revoie encore
Aux lieux où je vous vis pour la première fois !

Comme un oiseau blessé qui vient, l’aile meurtrie,
Mourir près de son nid, au bord de son ruisseau.
Qu’ainsi mon pauvre amour, brisé par vous, Marie.
Vienne chercher sa tombe auprès de son berceau !

Félix Arvers, Pièces inédites, 1851

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