I
Race d’Abel, dors, bois et mange ;
Dieu te sourit complaisamment.
Race de Caïn, dans la fange
Rampe et meurs misérablement.
Race d’Abel, ton sacrifice
Flatte le nez du Séraphin !
Race de Caïn, ton supplice
Aura-t-il jamais une fin ?
Race d’Abel, vois tes semailles
Et ton bétail venir à bien ;
Race de Caïn, tes entrailles
Hurlent la faim comme un vieux chien.
Race d’Abel, chauffe ton ventre
À ton foyer patriarcal ;
Race de Caïn, dans ton antre
Tremble de froid, pauvre chacal !
Race d’Abel, aime et pullule !
Ton or fait aussi des petits.
Race de Caïn, cœur qui brûle,
Prends garde à ces grands appétits.
Race d’Abel, tu croîs et broutes
Comme les punaises des bois !
Race de Caïn, sur les routes
Traîne ta famille aux abois.
II
Ah ! race d’Abel, ta charogne
Engraissera le sol fumant !
Race de Caïn, ta besogne
N’est pas faite suffisamment ;
Race d’Abel, voici ta honte :
Le fer est vaincu par l’épieu !
Race de Caïn, au ciel monte,
Et sur la terre jette Dieu !
Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857
Quel est le sens de ce poème ?
Bonjour, quel sens a le mot épieu dans cette poésie?
Mon Dieu ! Quelle vérité qui décrit si bien notre monde actuel et peut être ce qui l’attend et…. que Dieu vienne voir un peu ici ce qui se passe !
C’est un hommage à un monsieur, de la santé, effaré des : blouses noires des corbeaux tatoués sur la nuque, et que, hélas, je n’ai pu remercier de sa bonté…
Si vous inversez la proposition de Baudelaire, Cain devient Abel et Abel Cain, et vous découvrirez un poème prophétique qu’illustrera presque un siècle plus tard l’univers fantasque d’une humanité concentrationnaire.