Polissonnerie

Voltaire

Je cherche un petit bois touffu,
Que vous portez, Aminthe,
Qui couvre, s’il n’est pas tondu
Un gentil labyrinthe.
Tous les mois, on voit quelques fleurs
Colorer le rivage ;
Laissez-moi verser quelques pleurs
Dans ce joli bocage.

– Allez, monsieur, porter vos pleurs
Sur un autre rivage ;
Vous pourriez bien gâter les fleurs
De mon joli bocage ;
Car, si vous pleuriez tout de bon,
Des pleurs comme les vôtres
Pourraient, dans une autre saison,
M’en faire verser d’autres.

– Quoi ! vous craignez l’évènement
De l’amoureux mystère ;
Vous ne savez donc pas comment
On agit à Cythère ;
L’amant, modérant sa raison,
Dans cette aimable guerre,
Sait bien arroser la gazon
Sans imbiber la terre.

– Je voudrais bien, mon cher amant,
Hasarder pour vous plaire ;
Mais dans ce fortuné moment
On ne se connait guère.
L’amour maîtrisant vos désirs,
Vous ne seriez plus maître
De retrancher de nos plaisirs
Ce qui vous donna l’être.

Voltaire

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3 commentaires sur “Polissonnerie”

  1. etevenard

    dit :

    Un pur dialogue de théâtre! un sketch de grand humoriste! Beaumarchais n’est pas loin; C’est vivant et drôle comme le libertinage.

  2. gladys miel

    dit :

    Que vient faire Beaumarchais dans cette brillante plaidoirie pour l’amour, la parabole presque parfaite du désir amoureux sous une forme jouissive lol

  3. thierry

    dit :

    Un pur dialogue de théâtre! un sketch de grand humoriste! Beaumarchais n’est pas loin; C’est vivant et drôle comme le libertinage.

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