Ronde sentimentale

Théodore de Banville

Entrez dans la danse,
Voyez comme on danse !
Ronde.

Sur les gazons verts, le soir nous dansons,
Au clair de la lune, au bruit des chansons.

Tout brûlant d’amour, le Ciel dit à l’Onde :
Je ne puis descendre et baiser tes flots,
Ni dans tes beaux yeux, par le soir déclos,
Voir se refléter ton âme profonde.

Sur les gazons verts, le soir nous dansons,
Au clair de la lune, au bruit des chansons.

La Rose s’entr’ouvre et dit à l’Étoile :
Que n’ai-je, ô ma fleur ! des ailes d’oiseau,
Puisque la madone, avec son fuseau,
File un blanc nuage, et t’en fait un voile !

Sur les gazons verts, le soir nous dansons,
Au clair de la lune, au bruit des chansons.

L’Étoile scintille et dit à la Rose :
Je ne puis voler comme un papillon,
Mais je puis, cher astre ! au bout d’un rayon
Boire tous tes pleurs, sans que l’on en cause.

Sur les gazons verts, le soir nous dansons,
Au clair de la lune, au bruit des chansons.

Frémissante encor, l’Onde sous la flamme
Apaise ses flots et dit à l’Azur :
Le meilleur de toi dans mon lit obscur
Sommeille à demi sur mon sein qui pâme.

Sur les gazons verts, le soir nous dansons,
Au clair de la lune, au bruit des chansons.

Mars 1845.

Théodore de Banville, Les Stalactites, 1846

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